La question m’est venue d’un choriste : nous chantons le Requiem pour un conquérant de Gérard Legoupil, mais ne faudrait-il pas donner un éclairage plus vaste sur ce qu’est un requiem? En effet, tous les chanteurs de notre chorale n’ont pas une vaste culture musicale, et d’autres n’ont pas comme moi trempé leurs doigts dans l’eau des bénitiers dès leur tendre enfance. Un requiem, c’est une composition musicale et c’est une messe de funérailles.
Il ne s'agit pas pour moi d'étaler ma science, mais de remettre au clair pour tous les informations que j'ai glanées ici et là. Précision utile, car on m'accuse parfois d'être un donneur de leçons. Ce qui pour un prof est quand même habituel. Mais je préfère dire que je transmets des savoirs, dont chacun peut faire l'usage qu'il souhaite.
Une composition musicale
Dans l’acception commune des amateurs de musique, le mot Requiem désigne une composition musicale entendue lors d’un service liturgique pour les défunts ou interprétée en concert. À l’origine, ces œuvres étaient conçues pour être intégrées à la liturgie. Elles étaient essentiellement chantées par un chœur, précédé par une intonation brève (sur le simple mot Requiem) chantée par le célébrant sur les quatre notes du plain-chant. Ces vastes compositions musicales s’éloignèrent de la liturgie quand on y adjoignit d’importantes parties de solistes vocaux et d’accompagnement orchestral (merci wikipedia).

L’intonation du Requiem. Pour écouter, c’est ici.
Le plus célèbre des Requiems est sans doute celui de Mozart, mais nous ne pouvons pas négliger ceux de Verdi, de Berlioz, de Gounod ou de Fauré. Le plus ancien répertorié est celui de Johannes Ockeghem et le premier à inclure le Dies irae est celui d’Antoine Brumel (1560? – 1515?). Il y en a, selon de bonnes sources, plus de 2000. À chacun d’aller à la découverte, en passant de l’oeuvre de Tomas Luis de Victoria (ici, le Requiem de l’introit) au Requiem pour un con de Serge Gainsbourg.
Une messe de funérailles
Une messe qui suit le déroulement général des messes : un introit, un temps de pénitence (le Kyrie), des lectures entrecoupées de chants, l’offertoire (préparation des offrandes, le pain et le vin), le canon (le rite de la consécration) avec le Sanctus, puis la communion (l’Agnus Dei). La messe des défunts ne comporte ni le Gloria, ni le Credo, ni l’Alleluia, mais inclut une séquence, le Dies irae.
L’introit, le premier chant de la messe, est souvent un verset de psaume. Pour la messe des morts, le texte de l’introit est inspiré d’un texte du Vème siècle avant notre ère, le livre d’Ezras.
Requiem æternam dona eis, Domine, et lux perpetua luceat eis. Te decet hymnus Deus, in Sion, et tibi reddetur votum in Jerusalem. Exaudi orationem meam ; ad te omnis caro veniet. Requiem æternam dona eis, Domine, et lux perpetua luceat eis. | Donne-leur le repos éternel, Seigneur, et que la lumière éternelle les illumine. Dieu, il convient de chanter tes louanges en Sion ; et de t’offrir des sacrifices à Jérusalem. Exauce ma prière, toute chair ira à toi. Donne-leur le repos éternel, Seigneur, et que la lumière éternelle les illumine |

Après le Kyrie, et la lecture de l’épître, vient le Dies irae, Jour de colère, une séquence, un long poème du XIVe siècle qui évoque essentiellement le jugement de Dieu à la fin des temps. (article à écrire)
Ensuite vient l’offertoire : le célébrant place sur l’autel les offrandes, le pain (l’ostie) et le vin qui ensuite seront consacrées. Le choeur chante deux morceaux, Domine Jesu Christe et Hostias et preces, avec un répons, une sorte de refrain, Quam olim.
Domine, Jesu Christe, Rex gloriæ, libera animas omnium fidelium defunctorum de pœnis inferni et de profundo lacu. Libera eas de ore leonis, ne absorbeat eas tartarus, ne cadant in obscurum; sed signifer sanctus Michael repræsentet eas in lucem sanctam, *Quam olim Abrahæ promisisti et semini ejus. | Seigneur, Jésus-Christ, Roi de gloire, délivre les âmes de tous les fidèles défunts des peines de l’enfer et de l’abîme sans fond. Délivre-les de la gueule du lion, afin que le gouffre horrible ne les engloutisse pas et qu’elles ne tombent pas dans les ténèbres. Mais que Saint-Michel, le porte-étendard, les introduise dans la sainte lumière, que tu as autrefois promise jadis à Abraham et à sa postérité |
Hostias et preces tibi, Domine, laudis offerimus ; tu suscipe pro animabus illis, quarum hodie memoriam facimus. Fac eas, Domine, de morte transire ad vitam. Quam olim Abrahæ promisisti et semini ejus. | Nous t’offrons, Seigneur, le sacrifice et les prières de notre louange. Reçois-les pour ces âmes dont nous faisons mémoire aujourd’hui. Seigneur, fais-les passer de la mort à la vie. que tu as autrefois promise jadis à Abraham et à sa postérité |
Juste avant le rite de la consécration, après la préface, temps de louange, le choeur chante le Sanctus. Puis avant la communion, l’Agnus Dei, dans lequel le miserere nobis (aie pitié de nous) et le dona nobis pacem (donne-nous la paix) sont remplacés par dona eis requiem et dona eis requiem sempiternam (donne-leur le repos éternel).
Au moment de la communion, le choeur chante Lux aeterna, avec un répons.
Lux æterna luceat eis, Domine, cum sanctis tuis in æternum, quia pius es. Requiem æternam dona eis, Domine, et lux perpetua luceat eis. Cum sanctis tuis in æternum, quia pius es. | Que la lumière éternelle luise pour eux, Seigneur, au milieu de tes Saints et à jamais, car tu es miséricordieux. Donne-leur le repos éternel, Seigneur, et que la lumière éternelle les illumine. Au milieu de tes Saints et à jamais, car tu es miséricordieux |
